Miracle en Alabama

© MARY-X Distribution

(The Miracle Worker)

1962

Réalisation : Arthur Penn
Fiction, États-Unis, Noir et blanc ; 106 minutes.

Personnages : Helen Keller (Patty Duke), Annie Sullivan (Anne Bancroft)

Genre : Drame d’éducation

L'histoire

Née dans une famille sudiste aisée à la fin du 19e siècle, la petite Helen, 10 ans, vit murée en elle-même sans accès à la parole. Une méningite lui a fait perdre l’audition et la vue dans la petite enfance. Ses parents, aimants mais impuissants pour l’éduquer, recrutent une institutrice spécialisée à domicile. Annie, elle-même malvoyante, va tenter de sortir Helen de son mutisme en s’opposant à sa mère trop protectrice. Au terme d’une lutte acharnée, sa méthode sensorielle et gestuelle pour stimuler l’enfant déclenche en Helen un désir irrépressible de nommer et comprendre le monde.

Impact

En adaptant librement une pièce à succès tirée de l’autobiographie de la célèbre autrice et militante féministe Helen Keller (1880-1968), Arthur Penn signe plus qu’un biopic, une œuvre de toute beauté au noir et blanc contrasté, quasi expressionniste. Le cinéaste s’intéresse à la naissance du langage et le miracle est ici éducatif. La dactylologie et la langue des signes tactile (mots épelés en langue des signes directement dans les mains de l’enfant) sont pour la première fois à l’écran dans une fiction.

Éclairage

Le film montre qu’avant d’apprendre à communiquer la petite Helen se débattait furieusement contre son entourage. Elle pouvait être privée de repas, contentionnée, et occasionnellement giflée par sa préceptrice. Dans les années 1970-80, la communauté sourde, traumatisée par la dureté des instituts spécialisés, juge de telles scènes trop violentes et rejette le film. La pièce dont Arthur Penn a fait l’adaptation et l’histoire vraie d’Helen Keller ont inspiré des téléfilms grand public mais aussi, au sein du mouvement Crip1, le court métrage parodique Annie Dearest qui caricature la violence éducative représentée dans le film. D’autres éclairages voient dans Miracle en Alabama l’histoire d’un mentorat — Annie Sullivan incarnant une femme handicapée indépendante, représentation encore rare au cinéma pour l’époque. Historiquement, Helen et Annie ont travaillé ensemble jusqu’à la mort d’Annie.

Parentés thématiques

Des personnages sourds-aveugles sont les héros du long métrage documentaire de Werner Herzog Le Pays du Silence et de l’obscurité (1971). En 2005, la comédie musicale Bollywood Black offre un remake très lointain de Miracle en Alabama tandis qu’à Singapour Eric Khoo signe le poétique Be With Me, avec Theresa Chan en enseignante sourde-aveugle ayant un don culinaire hors du commun. En France, pour son biopic Marie Heurtin (2014), le réalisateur Jean-Pierre Améris a fait appel à une jeune actrice sourde pour incarner le rôle-titre, une jeune sourde-aveugle élevée au siècle dernier par des religieuses, dont certaines, sourdes, connaissaient la langue des signes et la lui enseignèrent.

Autrice : Diane Maroger

  1. Communauté d’artistes et écrivain·e·s s’identifiant en tant que personnes handicapées, aux Etats Unis et en Angleterre, dont les films et l’art vidéo ont été programmés à partir des années 80 dans des festivals tels que Superfest à Berkeley, Calgary Disability Festival, LDFF à Londres et, en France, le festival Retour d’image (2003 - 2010).

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