« Hair », de Mahmoud Ghaffari

Ce long métrage iranien remarqué au festival du film de Douarnenez est sorti sur les écrans français le 7 mars 2018, en version originale sous-titrée.

Hair, de Mahmoud Ghaffari
(Fiction, Iran, 2016 / Durée: 1h28), avec Shabnam Akhlaghi, Zahra Bakhtiari, Shirin Akhlaghi

Résumé : Trois jeunes Iraniennes sourdes et championnes de karaté, sont invitées à participer aux championnats du monde en Allemagne…  Les autorités iraniennes ne s’opposent pas à leur participation, pourvu que la tenue réglementaire couvre leurs cheveux et leur cou.

 

 

Distributeur français :
Chapeau Melon Distribution
Tel : 01 42 50 23 32

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Bande annonce

Document d’accompagnement contenant un entretien avec le réalisateur.

 

 

 

 

L’AVIS DU GROUPE DE VISIONNAGE

 

Pourquoi ce film ?

Hair a séduit l’équipe de visionnage du fait de son énergie et de sa singularité. Une part de mystère demeure sur les raisons qui ont poussé le cinéaste à choisir de mettre en scène des héroïnes sourdes, mais c’est peut-être justement ce qui nous a amenés à le faire entrer au catalogue des films recommandés par Retour d’image pour des ciné-débats. Il serait intéressant d’organiser ces débats en présence  d’un spécialiste du cinéma iranien capable d’en restituer le contexte.

Un autre mystère pour nous, était le choix du réalisateur de ne pas sous-titrer certains dialogues en langue des signes iranienne alors que les dialogues en persan sont, eux, bien sous-titrés… Nous avons été éclairés sur ce point, après notre discussion interne, par Bamchade Pourvali, critique et universitaire, responsable du site Iran ciné panorama  et chargé de l’accompagnement du film en France.

La mise en scène

«  La caméra mouvante et proche des comédiennes transmet de façon efficace l’émotion, l’urgence de la situation. Certaines images sont très fortes comme la scène du début face à un miroir et la toute fin avec la jeune femme crâne rasé qui marche, sans véritable espoir. » (Anna Marmiesse)

« Les actrices débordent d’énergie, à la fois de légèreté et d’intensité ! » (Sébastien Picout)

« C’est un film animé de l’énergie de la jeunesse. Les actrices sont incroyables. Elles sont sportives, belles, énergiques, je pense que le réalisateur les a choisies à cause de ça. » (Diane Maroger)


Les personnages féminins centraux

« Les personnages ne sont pas forcément handicapés par leur surdité mais surtout par le fait que ce sont des femmes » (Barbara Fougère)

« Oui, le film parle avant tout de la difficulté d’être une femme et de vouloir pratiquer un sport dans le contexte culturel iranien.» (Vanessa Gorce)

« C’est poignant car tout au long de ce film, on voit leurs joies, leurs rêves, leurs espoirs s’écrouler à cause des barrières imposées par leur religion alors qu’elles sont croyantes et qu’elles tiennent à leur religion. » (Sébastien P.)

 

La dramaturgie

 « Elles acceptent les règles du championnat en Allemagne mais leur école et leur pays leur refusent de s’y rendre, alors qu’elles pourraient enfin s’affirmer comme sportives à part entière si elles s’y rendaient. Leur colère se déchaîne à partir de là. La première partie du film est factuelle, la deuxième devient beaucoup plus émotionnelle et expérimentale dans la forme » (Diane M.)

« On ressent une impression de sur-place, qui est sans doute dû justement à la situation — les trois protagonistes sont en attente et quasiment enfermées, leur espace est comme une prison. » (Anna M.)

 

Le traitement de la surdité

« Leur   » handicap », la surdité, est une donnée du film et non son sujet, ce qui est intéressant. On se demande pourquoi elles sont toutes les trois sourdes, ce n’est jamais expliqué, et finalement tant mieux. » (Anna M.)

« Les autres personnages ne les regardent pas comme handicapées. La surdité fait partie de leur personnalité mais ce n’est pas elle qui les caractérise seulement. Le film étant semi documentaire, on voit qu’elles exercent pleinement leur sport, qu’elles ont des entraîneurs, qu’on les félicite d’aller en compétition… et que ça n’est pas à cause de la surdité qu’on les discrimine. » (Diane M.)

« Ce qui m’a fasciné le plus dans le film, c’est le thème de la communication, élément social qui nous permet de nous exprimer, de donner des avis, de poser des questions et même de contester. On voit avec désolation les personnes sourdes s’acharner pour se faire comprendre, en vain. Des quiproquos fusent dans tous les sens alors qu’en sachant qu’elles ont passé leur vie à ne pas être entendues, ni comprises, ni reconnues, elles auraient du coup, plein de choses intéressantes à dire, pleins de bonnes idées à proposer mais les autres ne comprennent pas leur langue… , d’où la communication entravée entre eux !»  (Sébastien P.)

 

L’absence de sous-titres pour la langue des signes

« Dans The Tribe, le réalisateur Miroslav Slaboshpytskiy avait fait le choix assumé de ne pas du tout sous-titrer son film du fait que la majorité des scènes étaient muettes ou en langue des signes. Le genre du film, le thriller, permettait de deviner ce qui se jouait. Il souhaitait que l’on  se concentre sur l’expressivité physique des acteurs sans la parole oralisée. Ici, plusieurs d’entre nous ont trouvé que l’absence de sous-titrage des parties en langue des signes iranienne  décrédibilise les propos des actrices sourdes face à des entendants dont les paroles sont sous-titrées. Seule une scène où il y a des enseignants, donc des entendants qui signent, est traduite en français. Cela pose question. » (Diane M.)

« J’ai éprouvé une certaine frustration à ne pas pouvoir les comprendre, ne pas savoir de quels thèmes elles parlent, et ne pas pouvoir comparer les signes iraniens aux signes français. C’est déroutant : on se sent privé de toute information et exclu de leurs vies. Le réalisateur Mahmoud Ghaffari a-t-il choisi de ne pas sous titrer les dialogues en langue des signes iranienne pour nous mettre dans les mêmes situations d’incompréhension et d’impuissance qu’elles face aux personnes entendantes qui décident tout pour elles, qui prennent leur place ?» (Sébastien P.)

 

La réponse de Bamchade Pourvali à nos questions

 
« Il y aurait en effet un certain nombre de choses à dire. Il s’agit du deuxième long métrage du réalisateur, qui est un des rares cinéastes iraniens indépendants aujourd’hui. Le parti-pris de ne pas sous-titrer les dialogues des héroïnes contraste avec la décision d’un autre jeune cinéaste iranien Morteza Farshbaf qui, pour son film Querelles (2011), avait sous-titré les dialogues même lorsque les personnages n’apparaissaient pas à l’écran (…)
Hair, est un film physique. Surtout, le réalisateur insiste sur le fait que l’absence de mots n’est pas un handicap pour ces jeunes filles dans leur sport ou leur vie quotidienne : elles apprennent des langues étrangères, écoutent de la musique. Contrairement à Zahra, Shirin et Shabnam portent des appareils auditifs qui leur permettent d’entendre.

Si on ne les écoute pas, c’est effectivement parce que ce sont des femmes et qu’elles n’ont pas leur mot à dire. Ce ne sont pas elles qui sont muettes mais les institutions qui sont sourdes. Le film montre la naissance d’une conscience politique à travers Shabnam qui n’est pas la plus courageuse des trois au début mais c’est la plus motivée et celle qui refusera de se résigner. Le combat qu’elle voulait mener sur le tatami, elle va le mener dans sa vie pour défendre ses droits.

C’est un film très fort qui résonne avec le combat actuel des femmes en Iran. Le cinéma iranien résonne ainsi avec l’actualité ».

 

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